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Bébé qui dort dans les bras de sa mère qui est debout.

Qu’est-ce que la théorie de l’attachement ?

Pour qu’un enfant puisse se développer et construire son identité, il a besoin de créer des liens sécurisants avec les personnes qui s’occupent le plus de lui, le plus souvent, son père et sa mère. C’est le psychiatre et psychanalyste britannique John Bowlby (1907-1990) qui a fondé la théorie de l’attachement en 1958 après avoir étudié les effets des séparations prématurées et prolongées entre les enfants et leurs parents après la Seconde Guerre mondiale. Selon lui, les bases relationnelles d’un individu se construisent en fonction des relations qu’il a vécues lorsqu’il était tout-petit. Dans cet article, on vous explique tout ce que vous devez savoir sur ce concept de théorie de l’attachement, qui est venu bouleverser l’idée première selon laquelle un enfant a simplement besoin d’être nourri pour se développer de façon équilibrée.

Les concepts de la théorie de l’attachement

La plupart des travaux à l’origine de la théorie de l’attachement ont été réalisés par le psychiatre et psychanalyste britannique, John Bowlby, les éthologues Harlow et Lorenz, ainsi que le psychiatre et psychanalyste autrichien René Spitz

La théorie de l’attachement selon John Bowlby

Selon Bowlby, l’attachement est la conséquence des comportements qui ont pour objectif de rechercher et maintenir une proximité avec une personne en particulier. Il s’oppose ainsi à Freud, qui considère que les besoins fondamentaux ne concernent que le corps (se nourrir, dormir, etc.).

L’attachement est un besoin primaire

Bowlby critique les théories psychanalytiques en vigueur à son époque qui ne s’intéressent pas suffisamment au lien pouvant exister entre un enfant et l’environnement dans lequel il évolue. Selon lui, pour qu’un enfant puisse se développer de façon équilibrée, il est essentiel qu’il parvienne à construire un lien d’attachement avec au moins une personne qui s’occupe de lui.

Le lien d’attachement se crée sur le long terme. C’est en lui prodiguant des soins physiques réguliers, en se rendant disponible, en lui apportant un soutien émotionnel, et en partageant des moments de qualité avec l’enfant que celui-ci va pouvoir créer ce lien avec l’adulte. Bowlby nomme cet adulte le caregiver

Le caregiver doit répondre à la fois aux besoins physiologiques et affectifs de l’enfant. Il lui apporte réconfort et proximité lorsqu’il se sent en danger. L’enfant doit se sentir proche de cette figure d’attachement et sécurisé, car c’est ce qui lui permettra ensuite de faire face aux dangers pouvant exister dans son environnement.

Selon Bowlby, l’attachement fait partie des besoins fondamentaux, car il estime que la relation d’attachement qu’entretient l’enfant avec sa figure d’attachement est aussi essentielle à son développement que le fait de se nourrir, dormir, etc.

Toutefois, le parent va plus ou moins bien remplir ce rôle en fonction de ce qu’il a lui-même vécu pendant l’enfance. S’il n’a pas été suffisamment sécurisé de son côté, il sera plus difficile pour lui de créer un attachement sécure à sa progéniture. Lorsque son histoire personnelle est très compliquée, il y a des risques que les relations d’attachement soient perturbées.

Bowlby fait surtout allusion à la mère comme figure d’attachement. En effet, lorsqu’il est tout-petit, c’est surtout sa mère qui parvient à l’apaiser du fait que c’est souvent elle qui passe le plus de temps avec lui. Malgré tout, l’enfant peut se tourner vers une figure d’attachement secondaire si la mère n’est pas disponible (elle tombe gravement malade et doit passer un long séjour à l’hôpital, par exemple). En effet, toute personne peut devenir une figure d’attachement à la condition qu’elle crée un lien durable avec l’enfant et réponde à ses besoins de sécurisation. Les bouleversements les plus sévères de caregiving pour l’enfant sont les longues séparations, les adoptions, les hospitalisations, et les familles d’accueil momentanées.

Le bébé va exprimer ses besoins en mettant en place des comportements d’attachement (pleurs, sourires, etc.) afin de rechercher ou de conserver une proximité avec sa mère. Cette dernière va y répondre par l’apaisement. 

La façon dont le parent répond aux besoins de l’enfant va déterminer son développement social et psychologique. Lorsque la figure d’attachement apporte des réponses adaptées à l’enfant, celui-ci comprend qu’il a toute sa place, qu’on lui porte de l’intérêt. Il se sent alors valorisé et prend confiance. C’est ce qui lui permettra de tisser ultérieurement des liens positifs avec les autres. La qualité des liens d’attachement favorise l’autonomie de l’enfant.

Une base de sécurité qui va permettre l’exploration

Au fil du temps, si la relation entre l’enfant et cette figure d’attachement est équilibrée, l’enfant se sentira suffisamment en sécurité pour aller explorer le monde tout en sachant qu’il pourra retourner vers elle en cas de difficulté. En effet, l’enfant est conscient que la relation avec le parent perdure malgré la séparation. Cette exploration débute notamment lorsqu’il peut commencer à se déplacer seul. Sa capacité à effectuer ces explorations va donc dépendre de la qualité des liens d’attachement. Si l’enfant ressent un danger dans son environnement, il sait qu’il peut se réfugier auprès de sa figure d’attachement, qui saura le protéger.

Konrad Lorenz et la notion d’empreinte

L’éthologue autrichien va établir la notion d’empreinte dans les années 1930. En étudiant le comportement animal, il se rend compte que dès leur naissance, les petits vont suivre le premier objet en mouvement qu’ils voient. Ses études montrent que les êtres vivants s’attachent naturellement à une figure spécifique dès qu’ils naissent.

Harry harlow et l’isolement social

Le psychologue américain va étudier le comportement de bébés macaques lorsque ceux-ci sont séparés de leur mère et totalement isolés. Il se rend compte que leur développement en est profondément altéré. Il en déduit qu’il est essentiel qu’un bébé puisse tisser un lien fiable et bénéficier de contacts physiques dès son arrivée au monde pour avoir un bon développement.

Mary Ainsworth et les différents types d’attachement 

La psychologue canadienne, Mary Ainsworth, a défini différents styles d’attachement de l’enfant : 

  • l’attachement sécure : il favorise la construction d’une bonne estime de soi, car la figure d’attachement va répondre de façon adaptée aux besoins de l’enfant. L’enfant se sent alors sécurisé et apte à explorer son environnement tout en ayant conscience qu’il pourra de nouveau se tourner vers la figure d’attachement en cas de difficulté. Même s’il peut être amené à désapprouver une séparation momentanée, il retrouve toujours ses parents avec bonheur ;
  • l’attachement insécure évitant : la figure d’attachement ne répond pas ou insuffisamment aux demandes de l’enfant. Il est donc livré à lui-même pour faire face à ses angoisses. Se sentant insécurisé, l’enfant ne parvient pas à faire confiance aux autres, et refoule ses émotions négatives. Il ne montre donc aucun ressenti à ses parents, que ce soit lors de séparations ou de retrouvailles ;
  • l’attachement insécure ambivalent ou résistant : la figure d’attachement répond de façon contradictoire aux besoins de l’enfant. Par exemple, si celui-ci montre qu’il est angoissé, elle va tantôt l’apaiser, tantôt lui montrer son irritation. L’enfant est désorienté et insécure, il manifeste donc beaucoup d’angoisse lors de la séparation. Ne parvenant pas à trouver du réconfort, il aura tendance à rechercher à la fois le contact avec sa figure d’attachement et à la rejeter ;
  • l’attachement désorganisé : un enfant désorganisé souffre souvent de maltraitances. Il a donc peur de sa figure d’attachement, qui va avoir des comportements négatifs, voire brutaux envers lui. Il va ainsi avoir tendance à adopter la même attitude (agressivité, violence, etc.). Son comportement est désorganisé (il s’approche de l’adulte en détournant la tête, par exemple). L’enfant peut aussi être témoin de violences, ce qui veut dire que sa figure d’attachement subit elle-même des traumatismes (violences conjugales, par exemple). 

René Spitz et l’hospitalisme

L’hospitalisme fait référence à l’ensemble des troubles physiques et psychiques qui se manifeste chez un enfant qui a été privé précocement de tout lien d’affection. C’est le psychiatre et psychanalyste américain René Spitz qui a mis en avant ce phénomène dans les années 1960. Cette altération du développement psychomoteur est liée à une carence affective sévère ou à un placement prolongé en institution.

Les quatre étapes de l’attachement

Bowlby a défini quatre phases pour la création du lien d’attachement : 

  1. la phase de pré-attachement : de la naissance à environ 2 ou 3 mois, le bébé accepte généralement plutôt bien la présence de n’importe quel adulte, il n’a pas encore de figure d’attachement principale ;
  2. les prémisses de l’attachement : de 3 à environ 6 mois, il commence à comprendre que certains adultes répondent plus facilement à ses signaux (pleurs, sourires, etc.). Le lien entre lui et sa figure d’attachement commence à se tisser peu à peu ;
  3. la phase d’attachement : de 6 mois à 2 ans environ, le bébé va s’attacher à une personne en particulier (le plus souvent sa mère). Il commence à ressentir de l’angoisse lorsque cette dernière s’absente ;
  4. la phase des relations réciproques : à partir de 2 ans, l’enfant est suffisamment sécurisé et comprend qu’il peut prendre de la distance avec sa figure d’attachement  et partir explorer le monde. En cas de difficulté, il sait qu’il pourra retourner vers elle pour obtenir du réconfort.

Les psychopathologies engendrées par une défaillance des liens d’attachement

Des bouleversements de la relation d’attachement augmentent le risque de survenue d’une pathologie ultérieure. Les symptômes les plus graves de troubles de l’attachement sont détectés chez les enfants ayant souffert de négligences, d’abus sexuels, ou qui ont été abandonnés ou placés.

Les troubles du comportement

Même si un attachement sécure n’assure pas un avenir facile d’un point de vue psychologique, il peut aider à développer des ressources personnelles pour mieux faire face aux difficultés. Tandis que les enfants qui souffrent de carences affectives sont susceptibles d’avoir des troubles du développement ainsi que des problèmes à s’adapter aux situations qu’ils rencontrent. Les adultes ayant un passé difficile peuvent rencontrer de grandes difficultés dans leurs relations d’attachement.

Bowlby estime que les enfants qui n’ont pas été suffisamment sécurisés ressentent le monde extérieur comme inhospitalier et imprévisible. Ils vont donc adopter des comportements d’effacement ou, au contraire, faire preuve d’agressivité pour lutter contre cet environnement qu’ils jugent dangereux. Cela se constate à travers le trouble des conduites pour certains de ces enfants.

Les troubles de l’attachement peuvent entraîner des troubles psychiques du fait du manque d’estime de soi et de confiance en soi, mais aussi du fait de l’anxiété que ces problèmes d’attachement génèrent.

De nombreux comportements (colère, opposition, agressivité) ont pour but d’attirer l’attention, de gagner la proximité de la figure d’attachement, qui néglige les signaux que l’enfant lui envoie habituellement. Mais ces attitudes sont susceptibles de générer des réactions encore plus négatives de la part de la figure d’attachement, ce qui va intensifier le risque de survenue d’un trouble des conduites.

À l’inverse, en cas d’attachement sécure, l’enfant développe de l’empathie et est plus à l’écoute des émotions de l’autre, ce qui limite grandement les risques d’apparition d’un trouble des conduites.

Les troubles relationnels 

Les angoisses précoces et durables que peut ressentir un enfant qui subit des traumatismes peuvent générer une incapacité à développer des interactions sociales ou à y répondre de façon adaptée. Son empathie est très peu développée et il peine à gérer ses émotions (il s’emporte facilement, il ne parvient pas à maîtriser sa violence, etc.).

L’accompagnement des enfants victimes d’un trouble de l’attachement

La prise en charge par les travailleurs sociaux doit commencer le plus tôt possible. Il est essentiel d’associer les parents, et d’apporter un soutien thérapeutique qui soit bienveillant et sécure.

Détecter les troubles d’attachement du côté de l’enfant

Plusieurs signes sont susceptibles d’alerter le travailleur social : 

  • l’enfant ne recherche pas de soutien auprès d’un adulte s’il se sent en danger ;
  • il ne se sent pas bien en cas de contact physique avec son père ou sa mère ;
  • il ne ressent pas d’empathie ; 
  • il peine à créer du lien avec les autres, notamment à se faire des amis ;
  • il fait preuve d’agressivité lorsqu’il doit respecter des règles ;
  • il ne réagit pas lorsque ses parents s’éloignent ; 
  • il essaie d’attirer l’attention par tous les moyens.

Détecter les troubles d’attachement du côté des parents

  • le parent ne répond pas aux signaux que lui envoie son enfant ou bien réagit trop tard ;
  • il ne recherche pas le contact physique avec son enfant ; 
  • il adopte une attitude fermée, détachée ;
  • il prodigue les soins de façon automatique, sans aucune émotion ;
  • il répond négativement aux sollicitations de l’enfant ;
  • il impose son rythme de vie à l’enfant.

Intervenir sur les éventuelles carences parentales

L’intervention du professionnel ne se limite pas à l’observation, même si celle-ci est indispensable pour comprendre ce qui fait souffrance chez l’enfant. Il n’est pas là pour juger les parents, mais pour les accompagner dans leur parentalité.

Le travailleur social va ainsi évaluer les compétences parentales, à savoir les attitudes et les comportements favorisant un développement normal de l’enfant. Pour que ces compétences parentales puissent évoluer favorablement, il est important que le parent ait la capacité et la volonté d’exercer son rôle.

C’est pourquoi les compétences parentales sont à distinguer des capacités parentales qui font référence à ce que le parent est capable de faire (en cas de déficience intellectuelle, de problème d’addiction, etc.).

Le professionnel observe également si le parent parvient à contrôler ses impulsions afin de s’assurer qu’il est capable de gérer ses émotions, cette perte de contrôle pouvant entraîner des maltraitances.

La reconnaissance de la responsabilité du parent est un autre point à vérifier. Le travailleur social ne se contente pas d’écouter ce que lui dit le parent, il regarde également la manière dont il agit. Parfois, il y a une différence entre sa parole et ses agissements.

Envisager le placement pour protéger l’enfant

Lorsque le danger est trop grand, les travailleurs sociaux peuvent être contraints de placer l’enfant afin qu’il soit en sécurité. Le professionnel peut ainsi devenir caregiver, c’est lui qui va répondre aux besoins de sécurisation de l’enfant. L’enfant qui a vécu des expériences traumatisantes doit réapprendre à faire confiance à l’adulte. Le professionnel va donc s’attacher à lui faire vivre des expériences qui vont l’aider à réparer ce manque de lien : 

  • il fait preuve de disponibilité pour répondre aux besoins de l’enfant ; 
  • il le sécurise ;
  • il adopte un comportement stable ;
  • il montre qu’il est présent en cas de détresse de l’enfant ;
  • il favorise son autonomie.

Face à des enfants qui rencontrent des problématiques diversifiées, il n’est pas toujours facile pour les travailleurs sociaux de bien identifier leurs besoins et de mettre en place les accompagnements adéquats lors d’un trouble de l’attachement. C’est pourquoi la formation continue est essentielle pour faciliter de bonnes prises en charge.

 

Chez Epsilon Melia, nous avons donc conçu une formation sur la théorie de l’attachement pour aider les professionnels à mieux comprendre ce concept afin qu’ils puissent adapter leurs accompagnements. Vous avez des questions sur cette formation ? N’hésitez pas à nous contacter.

 

Nous vous proposons une petite vidéo sur le trouble de l’attachement : 

https://www.youtube.com/watch?v=iYxFoYKLSMg