Qu’est-ce que le syndrome de Noé ?
Le syndrome de Noé a été découvert dans les années 1980 par l’épidémiologiste et vétérinaire Gary Patronek. Cette pathologie figure aujourd’hui dans la cinquième édition du manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, paru en 2013.
Le logement des individus souffrant de ce syndrome regorge d’animaux domestiques : des chats, des chiens, des oiseaux, des petits mammifères, etc. Les propriétaires de ces animaux sont appelés les collectionneurs (ou animal hoarders, en anglais).
Les personnes sont très attachées à leurs animaux, s’affichent comme très protectrices, et ne parviennent pas à s’en séparer. Elles ont réellement l’impression de les sauver de la rue.
Pourtant, elles ne leur prodiguent pas les soins adéquats du fait de soucis financiers ou tout simplement parce qu’elles n’ont pas conscience que les animaux sont en mauvaise santé et qu’elles font ainsi preuve de maltraitance animale. Ils sont mal nourris, déshydratés, ne bénéficient pas de contrôles chez le vétérinaire, et vivent au milieu de leurs excréments. Ceci entraîne une insalubrité des lieux ainsi que des maladies, des pertes de poids, et du stress chez les animaux. Les risques sont également bien présents pour les propriétaires qui peuvent tomber malades du fait du manque d’hygiène (allergies respiratoires, infections de la peau, parasites, salmonelles, présence de nuisibles, etc.). Parfois, les propriétaires n’ont même pas conscience que des animaux morts gisent dans un coin de leur logement.
De plus, les individus souffrant de ce syndrome se retrouvent souvent totalement isolés du reste de la société, du fait de conflits avec le voisinage. Pourtant, ils n’ont pas du tout le sentiment de déranger les autres habitants, pensant tout mettre en œuvre pour éviter les nuisances.
Le syndrome de Noé engendre du déni chez ces personnes recueillant des animaux de manière compulsive. Elles n’ont pas conscience de la réalité de la situation.
C’est pourquoi, la plupart du temps, ce trouble est détecté lorsqu’il y a des plaintes du voisinage ou lorsque la famille se rend compte que cette situation ne peut plus durer, et alertent les associations de protection des animaux.
Quelles sont les différences entre le syndrome de Noé et le syndrome de diogène ?
Même si ces deux syndromes font partie des troubles de la thésaurisation, le syndrome de Noé ne concerne que les animaux alors que pour le syndrome de diogène, il s’agit de conserver une multitude d’objets qui ne servent plus.
Par contre, ce besoin d’accumulation semble être le signe d’une grande anxiété et d’un profond mal-être chez ces individus. De plus, dans ces deux pathologies, le rapport à l’hygiène est largement détérioré, et bien souvent, les personnes souffrant du syndrome de Noé sont également concernées par la syllogomanie (accumulation compulsive d’objets).
Quelles sont les causes du syndrome de Noé ?
Généralement, une personne souffrant d’une maladie psychiatrique (trouble de la personnalité, paranoïa, dépression, etc.) a davantage de risques de souffrir du syndrome de Noé. Il s’agit majoritairement d’un trouble féminin.
Souvent, ces personnes vivent dans la solitude et ne bénéficient pas d’un soutien familial.
Ce trouble peut également émerger si la personne a subi un choc émotionnel intense : deuil, séparation, etc.
Il peut également s’agir de traumatismes liés à l’enfance : manque affectif, trouble de l’attachement, mauvais traitements, etc.
L’individu cherche à soigner sa propre vulnérabilité en essayant de porter secours à des animaux tout aussi vulnérables.
En réalité, par l’intermédiaire de cette compulsion, il cherche à soigner ses propres traumatismes, à combler un manque.
La personne n’est généralement pas consciente de ce mal-être, et ne fait donc appel à aucune aide parce qu’elle a simplement le sentiment d’être totalement dévouée à ses animaux.
Que dit la loi sur la possession d’animaux?
Selon l’article L214-1 du Code rural et de la pêche maritime, « tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce. »
L’article 214-6-1 précise que les particuliers qui sont propriétaires de plus de neuf chiens sevrés doivent mettre en place des installations et mesures sanitaires particulières.
Enfin, l’article L 214-3 stipule « qu’il est interdit d’exercer des mauvais traitements envers les animaux domestiques ainsi qu’envers les animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité. »
L’annexe I de l’arrêté du 25 octobre 1982 apporte des précisions sur les obligations que les propriétaires d’animaux sont tenus de respecter :
- les animaux doivent bénéficier d’une alimentation équilibrée et abondante afin de les maintenir en bonne santé, et les propriétaires sont chargés de tenir constamment à leur disposition une réserve d’eau fraîche dans un récipient propre ;
- ils doivent être protégés par un abri contre les intempéries (y compris les chiens placés sur un balcon) ;
- ils ne doivent pas être enfermés dans un local non aéré, sans lumière ni chauffage ;
- dans un chenil, chaque chien doit disposer de 5 mètres carrés, et d’une zone ombragée ;
- l’évacuation des excréments doit être effectuée tous les jours.
Que faire en cas de syndrome de Noé ?
Lorsque la famille ou un voisin constate qu’une personne est atteinte de ce trouble, l’important est d’avertir la mairie qui alertera les associations de protection des animaux pour qu’elles puissent aider le propriétaire à mieux gérer ses animaux (le conseiller sur l’alimentation, les soins réguliers à effectuer chez le vétérinaire, le ménage à faire dans le logement, etc.).
Si la situation est trop compliquée, les animaux peuvent être saisis et placés dans un refuge pour qu’ils puissent être adoptés une fois qu’ils auront reçu les soins nécessaires. Certains sont parfois en si mauvais état qu’ils doivent être euthanasiés. Toutefois, le propriétaire est généralement autorisé à garder quelques animaux afin qu’il ne sombre pas dans la dépression.
Comment soigner le syndrome de Noé ?
Le rôle des travailleurs sociaux est essentiel dans la détection et l’accompagnement des personnes souffrant du syndrome de Noé.
Cette pathologie est particulièrement complexe à traiter, d’autant plus qu’elle est souvent associée à un autre trouble psychique. De plus, les personnes en souffrance ne comprennent pas pourquoi elles se voient retirer leurs animaux alors qu’elles sont convaincues de leur porter secours. Elles ont donc bien souvent du mal à accepter d’être prises en charge. La plupart du temps, elles y sont contraintes du fait des plaintes.
Le diagnostic
Le professionnel doit tout d’abord évaluer la gravité de la situation ainsi que les besoins de la personne souffrante. Une expertise psychiatrique doit ainsi confirmer l’existence du syndrome de Noé.
Un plan d’intervention sur-mesure
Ce plan permet de recenser toutes les actions à mettre en place pour aider la personne à soigner son syndrome (aide au nettoyage, prise en charge psychiatrique, etc.).
Une large place est faite à la sensibilisation : comme les propriétaires de ces animaux n’ont pas conscience que ceux-ci vivent dans de mauvaises conditions, il est important de leur faire prendre conscience de ce dont ils ont besoin pour améliorer leur bien-être.
Plusieurs techniques peuvent être proposées à la personne pour l’aider à travailler sur sa souffrance :
- la relaxation ;
- la respiration ;
- la méditation de pleine conscience ;
- la thérapie cognitivo-comportementale : cette thérapie peut l’aider à prendre conscience que son comportement est pathologique, mais aussi lui faire comprendre que même si son désir est de sauver les animaux, de par son comportement, elle ne fait qu’aggraver leur état. L’objectif est ainsi de la confronter à la réalité et de l’aider à mettre en place un autre schéma de pensée.
Une coordination des actions
L’objectif est de développer des partenariats entre les différents acteurs impliqués dans la prise en charge de la personne souffrante (équipes de psychiatrie, médecin généraliste, et intervenants du secteur social et médico-social, par exemple). Cette collaboration interdisciplinaire est indispensable si l’on souhaite assurer une bonne coordination des différentes actions en faveur du patient et assurer une prise en charge globale. En effet, l’action sociale doit bien souvent compléter les actions de soins.
Le travail partenarial a l’avantage de permettre aux professionnels d’harmoniser leurs méthodes d’intervention ainsi que les buts à atteindre. Ceci implique un respect des postures de chacun et la poursuite d’un objectif commun tout en ayant conscience que le syndrome de Noé est un trouble complexe à soigner, et qui nécessite du temps.
Ce travail en réseau doit également permettre d’associer la famille afin de gagner sa confiance, de la sensibiliser à ce syndrome et de favoriser le dialogue.
La posture du travailleur social
Lorsqu’il y a un signalement, le travailleur social peut se rendre au domicile de la personne concernée pour effectuer un premier contact.
Empathie, écoute active, et patience sont les postures à privilégier pour aider la personne à faire face à son angoisse refoulée.
Chez Epsilon Melia, nous avons conscience des difficultés que peuvent rencontrer les professionnels du secteur social lorsqu’ils doivent prendre en charge une personne souffrant du syndrome de Noé. L’accompagnement est long, et les rechutes fréquentes. C’est pourquoi nous avons créé une formation pour les aider à mieux comprendre cette pathologie et à adopter la posture adéquate pour aider au mieux la personne en souffrance. Vous souhaitez en savoir plus sur notre formation concernant le syndrome de Noé ? Contactez-nous !
Nous vous proposons une vidéo sur le sujet :