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La prise en compte des effets du traumatisme chez l’enfant

La prise en compte des effets du traumatisme chez un enfant doit se faire rapidement afin d'éviter des séquelles graves. On vous dit tout.

Définition du traumatisme

On parle de traumatisme lorsque l’enfant a été confronté à une situation brutale entraînant une atteinte à son intégrité physique ou un risque de mort. L’enfant ou l’adolescent peuvent en être victimes ou témoins. Cet évènement traumatique engendre une peur extrême, de l’effroi, et peut s’accompagner d’un ensemble de troubles psychiques, ce qui correspond à un psychotraumatisme.

La psychiatre américaine Lenore Terr a conçu une typologie des traumatismes en 1991 :

  • l’évènement traumatique est momentané (agression physique, accident, etc.) ;
  • l’évènement est répétitif, il se prolonge dans le temps (inceste, violences conjugales, etc.).

Dans le prolongement de cette typologie, la psychiatre américaine Judith Lewis Herman a différencié le traumatisme simple (unique) et le traumatisme complexe (du fait d’une situation qui se prolonge).

Les effets du traumatisme peuvent être très graves sur un enfant. Et lorsque les symptômes ressentis perdurent au-delà de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, il peut s’agir d’un trouble de stress post-traumatique.

Les principaux traumatismes chez l’enfant et l’adolescent

Selon l’article 371-1 du Code civil, l’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. Elle appartient aux parents jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé, sa vie privée et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne. L’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques.

Mais dans 80 % des cas, les violences ont lieu au sein de la famille, et les enfants sont victimes d’individus en qui ils pensaient pouvoir avoir confiance.

Il est aujourd’hui reconnu que le bébé peut être victime de souffrance psychique. Dès sa naissance, il est capable de ressentir une expérience traumatique et d’y répondre par des signes de détresse (troubles alimentaires, du sommeil, etc.). Sa capacité à faire face à cet évènement traumatique dépend de la faculté de l’entourage à le protéger.

Tous ces traumatismes émotionnels et physiques vécus par l’enfant peuvent avoir un impact dans sa vie d’adulte, avec des peurs qui seront toujours présentes.

Les violences vécues par les enfants vont bouleverser leur système de croyances. Elles peuvent leur faire perdre confiance envers les adultes. Par exemple, un enfant développe progressivement la croyance que ses parents sont là pour le protéger. Des évènements graves (comme l’inceste) peuvent venir détruire toutes ces convictions qu’il s’était préalablement construites. Ce bouleversement est susceptible de  modifier sa perception des autres, et du monde.

Il existe 5 principaux traumatismes de l’enfance :

La violence sexuelle

Celle-ci peut prendre plusieurs formes : l’inceste (agression par un membre de la famille), l’agression sexuelle (attouchements, viol), le harcèlement sexuel, l’exhibition sexuelle (l’enfant en est victime dans la rue, par exemple), l’accès à des films pornographiques, l’exploitation pédophile.

La violence physique

Elle est la forme de violence qui se repère le plus facilement parce que l’enfant en conserve des traces : coups, morsures, brûlures, etc. Il subit à la fois un traumatisme physique et psychologique. De nombreux facteurs augmentent le risque de violence sur l’enfant ou l’adolescent : si celui-ci est issu d’un viol collectif, si les parents sont toxicomanes ou vivent dans la pauvreté, en cas de violences conjugales, de troubles psychiques chez l’un des parents, etc.

La violence psychologique

On compte six types de violences émotionnelles :

  • l’isolement : l’enfant est tenu à l’écart du reste de la famille, par exemple ;
  • le rejet : il subit des humiliations, est constamment rabaissé ;
  • l’absence d’attention : il est négligé, les parents font preuve d’indifférence à son égard ;
  • la terreur : les parents menacent l’enfant de le frapper, de l’abandonner ;
  • l’exploitation : la famille l’oblige à servir un membre de la famille, par exemple ;
  • la corruption : les proches incitent l’enfant à participer à des activités répréhensibles.

Les violences conjugales

Lorsqu’un enfant y est confronté, on considère qu’il subit tout autant le traumatisme psychologique que le parent qui en est victime.

La négligence

Certains parents ne parviennent pas à satisfaire les besoins fondamentaux d’un enfant, à lui fournir les soins nécessaires à son développement. Elle est considérée comme une forme de maltraitance. Cette négligence peut être intentionnelle ou non (manque de ressources, difficultés personnelles des parents, etc.).

Depuis quelques années, un autre traumatisme vient malheureusement s’ajouter à ceux cités ci-dessus :

Le traumatisme de l’exil

Les mineurs non accompagnés ont vécu un parcours chaotique avant d’arriver dans le pays d’accueil. Et une fois arrivés en Europe, ils subissent aussi le rejet de la population locale, ils vivent dans la rue, et perdent totalement confiance. Ils sont obligés de devenir adultes prématurément, et souffrent de nombreuses blessures invisibles

À noter qu’il existe bien d’autres situations susceptibles d’être traumatisantes pour un enfant ou un adolescent : traumatisme du fait de la séparation des parents, du décès du père ou de la mère, d’un placement en MECS, suite à un accident de voiture, ou un traumatisme d’abandon, par exemple.

Les symptômes du traumatisme chez l’enfant et l’adolescent

Un enfant victime ou témoin d’un évènement traumatique peut présenter des symptômes passagers. Si ceux-ci ont lieu dans le mois qui suit la situation traumatisante, on parle de trouble de stress aigu. Si ceux-ci perdurent, le diagnostic de trouble de stress post-traumatique peut être posé.

Les effets d’un traumatisme sur un enfant ou un adolescent sont nombreux :

  • des troubles du comportement (agressivité, violence, etc.) : un enfant traumatisé est souvent plus anxieux et bagarreur ;
  • des soucis pour gérer ses émotions ;
  • une période de régression dans son développement ;
  • des troubles de l’attention ;
  • des troubles d’apprentissage ;
  • une dépression ;
  • des addictions ;
  • un trouble anxieux généralisé ;
  • des phobies ;
  • des crises d’angoisse aiguës ;
  • des douleurs somatiques, car le choc émotionnel se répercute sur le corps;
  • du mutisme ou, au contraire, de l’hyperactivité ;
  • un manque de confiance en soi, de la honte, de la culpabilité ;
  • des automutilations ;
  • des tentatives de suicide.

Pour essayer de survivre à l‘évènement traumatique, il peut faire preuve de déni (se persuader que son agresseur agit de cette façon pour son bien), ou faire comme si cet acte violent n’a jamais eu lieu.

Les symptômes du trouble de stress post-traumatique

Lorsque les symptômes ressentis suite à un traumatisme se prolongent au-delà de plusieurs semaines, voire plusieurs mois, l’enfant peut souffrir d’un trouble de stress post-traumatique. Le risque de développer ce type de syndrome est plus élevé si l’enfant sent sa vie menacée et s’il ne trouve pas de soutien suite au traumatisme. C’est pourquoi l’état de stress post-traumatique doit être pris en charge rapidement, car il peut entraîner un trouble de la mémoire implicite émotionnelle ou mémoire traumatique. Celle-ci se manifeste par :

  • une reviviscence de l’évènement traumatique : l’enfant est submergé par le choc qu’il a subi : il peut faire des cauchemars post-traumatiques, avoir des flashs-back. Des situations rencontrées, des odeurs, des bruits, etc., peuvent lui rappeler cette situation traumatisante. C’est notamment le cas lorsque l’enfant a subi des maltraitances, des agressions sexuelles, des tortures. Il revit constamment ce traumatisme et a toujours le sentiment que cet évènement pourrait se reproduire.
  • une hypervigilance et des stratégies d’évitement : les enfants et les adolescents ayant subi un traumatisme se sentent perpétuellement en danger. Ils essaient ainsi d’éviter certains lieux pouvant leur rappeler l’évènement vécu ;
  • des symptômes de dissociation : ils tentent également de refouler leurs émotions, car il est trop difficile pour eux de se rappeler ce qui leur est arrivé. Ce mécanisme de défense, appelé la dissociation traumatique, permet à l’enfant de se distancier de son expérience douloureuse, de ses ressentis, de fuir la réalité.

Le risque de développer un trouble de stress post-traumatique dépend de plusieurs facteurs :

  • du tempérament de l’enfant ;
  • de son passé (s’il a déjà été confronté à d’autres évènements traumatiques) ;
  • du soutien de l’entourage ;
  • de la gravité de la situation traumatisante (blessures physiques, par exemple).

Les réactions diffèrent en fonction de l’âge

Les enfants de moins de 6 ans sont fortement dépendants des réactions de leur entourage concernant la situation vécue. Ils souffrent surtout d’angoisse de séparation, d’une régression dans leur développement, de crises de larmes.

Les enfants de 6 à 12 ans peuvent également connaître des épisodes régressifs, avec des troubles du sommeil, des cauchemars, de la nervosité, des troubles de l’attention, des phobies scolaires, des problèmes somatiques (maux de ventre, nausées, etc.), un trouble anxieux généralisé.

Les symptômes des adolescents s’apparentent à ceux des adultes : évitement, dépression, addictions, tentatives de suicide, troubles de la personnalité antisociale, etc.

Les éléments à prendre en compte avant toute prise en charge de l’enfant ou de l’adolescent

Le travail des professionnels du secteur social et médico-social est de réparer ces êtres torturés bien trop tôt par la vie, de modifier la représentation que ces enfants ont d’eux-mêmes lorsqu’ils ont subi des traumatismes, de restaurer leur confiance perdue ainsi que le goût de vivre. Ils doivent s’intéresser à leurs différentes souffrances, celles qu’ils expriment tout comme celles qui restent enfouies. Car si les plaies restent ouvertes,  ils continueront de considérer que le monde est dangereux, et adopteront des attitudes destructrices envers eux-mêmes ou envers les autres. Les travailleurs sociaux ont pour mission de leur montrer que la vie vaut la peine que l’on s’y attarde.

L’âge

En fonction de l’âge auquel l’enfant a été confronté à l’évènement traumatique, celui-ci a une représentation de la mort différente. Vers l’âge de 3 ans, il conçoit la mort comme une séparation. Vers 7 ans, cette séparation est perçue comme définitive tandis qu’à l’entrée de l’adolescence, il y a une prise de conscience que la mort fait partie de la vie et qu’elle est inévitable.

Les réactions de l’entourage

Le traumatisme peut être plus ou moins important selon que l’enfant a été entouré par ses proches et leur attitude face à ce qu’il a subi (bienveillance, rejet, etc.). Parfois, lorsqu’il s’agit de traumatismes familiaux, les parents ont déjà bien du mal à se remettre eux-mêmes, ils peinent donc à s’occuper correctement de leur enfant qui souffre également de ce bouleversement.

Son vécu

Face à un choc traumatique, l’enfant peut faire appel à ses ressources personnelles pour s’en sortir. Mais s’il a un passé compliqué, il se peut que son état émotionnel soit déjà bien fragile.

S’il ne bénéficie pas de soutien, il se retrouve dans l’obligation d’assumer ce traumatisme seul. Et lorsqu’il n’y a aucun témoin, c’est simplement la parole de l’enfant qui pourra être prise en compte.

La prise en compte des effets du traumatisme chez l’enfant dans les accompagnements

Plusieurs types de prises en charge peuvent être proposés à l’enfant ou l’adolescent en souffrance :

Le defusing

Les interventions de type defusing ou soins immédiats ont lieu dans les heures qui suivent l’évènement traumatique. En principe, celles-ci se déroulent à l’endroit où a eu lieu cette situation traumatisante. L’objectif est de prendre en charge l’enfant rapidement et efficacement ainsi que sa famille :

  • l’enfant est mis en sécurité ;
  • il bénéficie d’une aide médicale ;
  • un soutien psychologique d’urgence lui est apporté ;
  • les professionnels s’assurent de la satisfaction de ses besoins vitaux ;
  • la famille est alertée sur les symptômes pouvant faire suite à ce choc ;
  • les proches reçoivent des informations sur les professionnels pouvant aider l’enfant.

Ce premier entretien doit permettre à l’enfant d’extérioriser ses émotions et d’être rassuré. Les professionnels ne minimisent pas ce qu’il a subi, et lui font prendre conscience de ses ressources personnelles pour affronter ce choc.

Les entretiens individuels ou en groupe

Un debriefing  peut avoir lieu sous forme d’entretiens individuels ou de groupe. Les professionnels posent d’abord des questions ouvertes pour ne pas influencer les réponses de l’enfant ou de l’adolescent. Il est important de laisser l’enfant raconter en détail la situation qu’il a vécue. Les plus jeunes peuvent se voir proposer des jeux ou du dessin pour faciliter le récit. Il est important de prendre en compte le fait que les parents minimisent parfois les situations traumatisantes vécues par leur enfant, notamment si celui-ci est très jeune.

Les accompagnements à plus long terme

Il existe plusieurs thérapies si un accompagnement plus long s’avère nécessaire. En voici les principales :

  • la thérapie cognitivo-comportementale : axée sur le traumatisme, elle vise à aider l’enfant ou l’adolescent à surmonter les conséquences négatives de l’évènement traumatique. Il est invité à se confronter à ce qu’il a subi et à modifier les schémas de pensée négatifs qui contribuent aux symptômes. Cette thérapie est centrée sur le présent. L’enfant est exposé progressivement à l’évènement qui a fait souffrance pour lui permettre de développer des stratégies plus adaptées pour faire face à cette situation
  • l’EMDR pour soigner le traumatisme : La thérapie de désensibilisation et de retraitement par les mouvements oculaires incite l’enfant à revivre son traumatisme sans ressentir les angoisses et sensations de danger qui en découlent. Elle a ainsi pour objectif d’aider l’enfant à assimiler l’évènement traumatique et à apprendre à vivre avec ;
  • la relaxation et la méditation sont également de bonne options : la méditation est une thérapie de pleine conscience particulièrement efficace pour soigner les traumatismes de l’enfance en réduisant l’anxiété et la dépression.

Quel que soit cet accompagnement, il est essentiel que l’entourage soit présent pour l’enfant et le soutienne pour qu’il puisse retrouver un équilibre émotionnel.

La formation des professionnels du secteur social et médico-social est également primordiale afin que les travailleurs sociaux sachent repérer précisément les effets du traumatisme chez l’enfant et l’adolescent, et lui apporter les soins adaptés.

Chez Epsilon Melia, nous avons conscience de la difficulté que peuvent avoir les professionnels à repérer ces signes ainsi que les blessures invisibles. C’est pourquoi nous avons créé une formation leur permettant de mieux connaître le psychotraumatisme chez l’enfant pour qu’ils puissent concevoir des modalités d’accompagnement qui correspondent au mieux à ses besoins. Vous avez besoin de plus de précisions sur cette formation ? Contactez-nous !

Livre conseillé sur le sujet : L’enfant face au traumatisme, Hélène Romano, éditions Dunod.